Sophie Gidrol est palliatothérapeute et accompagne les proches d’un patient en fin de vie dans l’étape de vie qu’ils traversent, pour prendre soin d’eux durant cette perte comme durant le deuil.
Tuttis est allé l’interviewer.
Quelle est votre histoire ?
J’ai exercé durant 18 ans en tant qu’infirmière en soins palliatifs (USP et EMSP).
J’ai vu le temps disponible pour les familles diminuer tout au long de ma carrière pour se recentrer sur le patient. C’est pourquoi depuis début 2019, je propose mes services aux personnes perdant un proche puis endeuillées pour avoir des ressources et arriver à vivre plus qu’à subir ses étapes de vie imposées. Pour me retrouver, vous pouvez vous rendre sur le site www.accompagnementfindevieetdeuil.com.
Mon utilité ?
Les proches ne savent plus comment vivre ces séparations en authenticité. Les chambres d’hôpitaux des patients en fin de vie sont remplies de gens qui ont « mangé du ciment ». Personne ne parle pour préserver une situation précaire sûrement, tendue par les angoisses et sentiments de chacun. J’aide à la remise en lien au sein des familles puis soutiens le cheminement lors du processus de deuil pour que celui soit un chemin « de la mort à la vie » et non un mauvais moment auquel on préfère ne plus penser.
L’actualité :
Au jour le jour, la société ne sait plus vivre cette étape comme un moment de vie, alors la plupart l’endurent, attendant patiemment que cela passe.
La crise sanitaire du COVID-19 implique un confinement et l’interdiction des rassemblements même pour les cérémonies funéraires. Ces rituels sont plus que nécessaires pour un « bon départ » dans le processus de deuil. Je pense qu’il nous faut être vigilant et anticiper ces manquements pour éviter des futurs deuils pathologiques.
Pourquoi cela peut-il intéresser spécifiquement les infirmiers?
Les infirmiers sont en première ligne pour aider à la verbalisation. En effet, l’utilisation des mots et leur signification va devenir essentiel pour que le proche intègre le décès et non la disparition du défunt. Une vigilance accrue d’éléments de ce type permettra la prévention de deuils pathologiques et diminuera au niveau santé publique, les répercussions au long terme de dépressions.
Les infirmiers ont pour compétences d’« organiser et coordonner des interventions soignants ». Il va donc de notre rôle propre d’indiquer aux proches lorsque nous le pensons nécessaire, un soutien spécifique lors de ces étapes complexes.
Je suis donc avec plaisir à disposition de mes collègues pour que nous puissions réfléchir ensemble à leurs situations difficiles rencontrées.
Quelles évolutions prévoyez-vous?
Dans un monde idéal, j’aimerai que la mort et le deuil soient socialement admis, avec une vraie reconnaissance et encadrement.
Les proches pourraient prendre le temps nécessaire pour accompagner leur mourant, faire leurs adieux et ainsi vivre mieux la séparation et l’entrée en deuil.
Les endeuillés, eux pourraient user la charge traumatique de la perte au sein de la population, avec une vraie reconnaissance de leur travail psychique pour aller jusqu’à une renaissance.rtise.